UNCP UNCP
L'UNCP est le syndicat professionnel des coureurs cyclistes français.
Syndicat de service et de dialogue constructif.
Créé il y a plus de 60 ans, il a pour vocation la représentation des coureurs et la défense de leurs intérêts collectifs et individuels.
contact@uncp.net . Comité Directeur . UNCP 161 Chemin du Buisson – 38110 DOLOMIEU
  • Route Pro Championnats de France Cassel 2023 - Photo Bruno Bade
  • Route Pro Photo Bruno Bade
  • Route d’Occitanie 2020 Photo Bruno Bade
  • Tro Bro Leon 2019 Photo Bruno Bade
  • Paris Camembert 2020 Photo Bruno Bade
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Le billet de Marc FAYET : Un Tour de Chants

On n'avait jamais vu ça ! me dit un des employés du Palais des Congrès. ''J'avais jamais vu autant de monde à un anniversaire au palais des congrès depuis celui de Charles Aznavour en 2004 à l'occasion de ses 80 ans''. C'est dire comme la référence était flatteuse. Le souvenir en était si vivace que quelques échos de ses chansons résonnaient encore pendant cette longue matinée. Dans cette cohue passionnée il me semblait d'ailleurs entendre comme un hymne ce premier couplet ''Viens voir les comédiens, voir les musiciens, voir les magiciens qui arrivent''. Foule bigarrée et multiple, tous acteurs d'un même spectacle chaque année renouvelé depuis 1903. Tous les membres de cette famille qui pour rien au monde n'auraient voulu manquer ce centième anniversaire, occupaient pour la première fois la totalité des fauteuils et pourtant, de manière tout à fait contradictoire, il y avait de nombreux absents ce jour-là. Certains étaient excusés, d'autres se sont excusés, d'autres pas encore, certains étaient retenus, d'autres se sont retenus, d'autres abstenus. On fêtait 100 printemps mais surtout 100 étés et aussi 100 hivers, car comment traverser un siècle sans trimballer son lot d'échecs, de déception, de rêves brisés. ''Le temps sans joie, le temps des merveilles, le temps d'un jour, le temps d'une seconde, le temps qui court ou celui qui gronde'' chantait Aznavour sur cette même scène. Le premier à gronder fut Monsieur Jean-Etienne Amaury qui sévèrement déplorait ''la présence d'individus malhonnêtes, certains ont été stoppés par la justice, d'autres doivent l'être''. Premier coup de semonce, premier avertissement adressé à cette famille turbulente et pourtant ce matin-là particulièrement docile et attentive devant lui, riant quand elle le voulait, applaudissant quand elle le sentait, se taisant quand il le fallait. Comme dans toute famille, il y a des tensions, des dissensions, des conflits, des jalousies et des méfiances. Il semblait même que des ruptures s'officialisaient et Charles qui chantait ''désormais on ne nous verra plus ensemble. Désormais mon coeur vivra sous les décombres''. Désormais c'est Christian Prudhomme qui prend la parole. Encore plus grave, mais sa voix le lui permet, encore plus tendu, mais son immense carrure est un atout, encore plus cinglant, mais sa fonction l'y autorise. ''Le Tour appartient à ceux qui l'aiment, il appartient à notre patrimoine, il fédère. L'ennemi ce n'est pas le cyclisme.'' Et l'écho de Charles fait entendre ''You are the one for me for me for me formidable !''. Applaudissements. Les rênes semblent être reprises même si certains s'agitent sur leurs fauteuils, que d'autres commencent à tousser ou à racler le fond de leur gorge desséchée, avant de recevoir la deuxième couche. ''La part des managers est essentielle. Ils doivent être au sens propre, les garde-fous…'' Reapplaudissements mais pas de tous. Acquiescements, hochements de tête contraires, sourires crispés, regards en coins, malaises et puis, et puis on passe à autre chose et Charles qui chantait : ''Camarade, tu étais mon seul ami mon camarade, tous les deux nous avons fait les barricades, mon camarade''. On annonce enfin le gâteau de la fête, l'officielle raison de notre présence à tous, le parcours de ce centième tour. Il est beau, plein de promesses, plein d'espoirs, plein de souvenirs aussi comme Charles: ''un jour ou l'autre, on veut faire à l'envers ce qui fut notre course mais on perd à remonter aux sources, un jour ou l'autre''.

Triomphe pour cette belle réussite qui nous mènera de Porto Vecchio à Paris. On finit par des champions sur la scène, de simples acteurs posés là, car on sait, en dépit de leur palmarès, qu'aujourd'hui ce n'est pas eux les plus importants. Le plus important c'est le public de Juillet sur le bord des routes, Ils seront 12 Millions, le plus important c'est la beauté de la France en Juillet, elle déroulera 3360 kms carrés de magie géographique. Le Tour est plus fort que tout semble être la devise du jour. La preuve en est, il a 100 ans et il est toujours présent, tout comme Robert Marchand également présent ce jour-là, le centenaire le plus rapide à vélo qui au bas de la scène serre vigoureusement la main de Christian Prudhomme comme si le centenaire qu'il est représentait le Tour à lui tout seul, remerciant ceux qui le soutiennent en dépit de ses errements passés, s'excusant déjà des écarts futurs. Puis c'est la fin de la cérémonie que beaucoup ont trouvée belle, que d'autres ont trouvée rebelle, d'autres l'ont trouvée décevante, d'autres insignifiante. Elle ne pouvait pas plaire à tout le monde, ni faire plaisir à tout le monde car tout le monde cherche le responsable de la situation qui est toujours l'autre forcément et pourtant comme le chante Charles ''Dans dix ou vingt ans qui sait, si enfin libre désormais d'un passé de bosses et de plaies faites d'orgueil et de bêtises, malgré le mal que tu me fais, connaîtrons nous enfin la paix ?''. Tous les espoirs sont donc permis même si au sortir du Palais les langues se délient, les regards se fuient, on refuse certaines poignées de main, on esquive quelques approches, on évite certains sujets car tout est à fleur de peau. Personne n'a la solution mais tout le monde a des idées. Chacun trimballe nerveusement ses propres questionnements, ses propres doutes cherchant de nouvelles alliances, réfutant de vieilles amitiés ''Mon ami mon judas, dans l'ombre joue avec ta proie, tire adroitement les ficelles, tu n'es pas bouffon, tu es roi, je ne suis que polichinelle, moi, doux rêveur et tête de bois''. Faut-il construire encore sur cette vieille bâtisse à la si belle apparence mais presque en ruine à l'intérieur ? Certains le croient, pas d'autres et pourtant tous sont venus au pied du vénérable centenaire c'est bien la preuve que malgré tout ils continuent à le respecter, à l'aimer en secret, comme moi ''Et moi dans mon coin, si je ne dis rien, je remarque toutes choses, et moi dans mon coin, je ronge mon frein, en voyant venir la fin'' Pour une fois Charles je ne suis pas d'accord avec ta chanson car moi je ne vois pas venir la fin, je vois un début… Début de je ne sais pas de quoi mais il est notre seule issue. Je sais que vous pensez tous comme moi alors continuons à y croire car c'était quand même un joli tour de chant, pas un chant du Cygne mais un chant du Signe, celui du destin, peut-être le dernier signe qu'il faut vite interpréter, qu'il faut rapidement saisir car ce 24 Octobre 2012 il est notre dernière chance de chanter comme Charles ''Emmenez-moi au bout de la terre. Emmenez-moi au pays des merveilles, il me semble que la misère serait moins pénible au soleil''.

Marc Fayet 
26 octobre 2012

Le billet de Marc FAYET : Un Tour de Chants

On n'avait jamais vu ça ! me dit un des employés du Palais des Congrès. ''J'avais jamais vu autant de monde à un anniversaire au palais des congrès depuis celui de Charles Aznavour en 2004 à l'occasion de ses 80 ans''. C'est dire comme la référence était flatteuse. Le souvenir en était si vivace que quelques échos de ses chansons résonnaient encore pendant cette longue matinée. Dans cette cohue passionnée il me semblait d'ailleurs entendre comme un hymne ce premier couplet ''Viens voir les comédiens, voir les musiciens, voir les magiciens qui arrivent''. Foule bigarrée et multiple, tous acteurs d'un même spectacle chaque année renouvelé depuis 1903. Tous les membres de cette famille qui pour rien au monde n'auraient voulu manquer ce centième anniversaire, occupaient pour la première fois la totalité des fauteuils et pourtant, de manière tout à fait contradictoire, il y avait de nombreux absents ce jour-là. Certains étaient excusés, d'autres se sont excusés, d'autres pas encore, certains étaient retenus, d'autres se sont retenus, d'autres abstenus. On fêtait 100 printemps mais surtout 100 étés et aussi 100 hivers, car comment traverser un siècle sans trimballer son lot d'échecs, de déception, de rêves brisés. ''Le temps sans joie, le temps des merveilles, le temps d'un jour, le temps d'une seconde, le temps qui court ou celui qui gronde'' chantait Aznavour sur cette même scène. Le premier à gronder fut Monsieur Jean-Etienne Amaury qui sévèrement déplorait ''la présence d'individus malhonnêtes, certains ont été stoppés par la justice, d'autres doivent l'être''. Premier coup de semonce, premier avertissement adressé à cette famille turbulente et pourtant ce matin-là particulièrement docile et attentive devant lui, riant quand elle le voulait, applaudissant quand elle le sentait, se taisant quand il le fallait. Comme dans toute famille, il y a des tensions, des dissensions, des conflits, des jalousies et des méfiances. Il semblait même que des ruptures s'officialisaient et Charles qui chantait ''désormais on ne nous verra plus ensemble. Désormais mon coeur vivra sous les décombres''. Désormais c'est Christian Prudhomme qui prend la parole. Encore plus grave, mais sa voix le lui permet, encore plus tendu, mais son immense carrure est un atout, encore plus cinglant, mais sa fonction l'y autorise. ''Le Tour appartient à ceux qui l'aiment, il appartient à notre patrimoine, il fédère. L'ennemi ce n'est pas le cyclisme.'' Et l'écho de Charles fait entendre ''You are the one for me for me for me formidable !''. Applaudissements. Les rênes semblent être reprises même si certains s'agitent sur leurs fauteuils, que d'autres commencent à tousser ou à racler le fond de leur gorge desséchée, avant de recevoir la deuxième couche. ''La part des managers est essentielle. Ils doivent être au sens propre, les garde-fous…'' Reapplaudissements mais pas de tous. Acquiescements, hochements de tête contraires, sourires crispés, regards en coins, malaises et puis, et puis on passe à autre chose et Charles qui chantait : ''Camarade, tu étais mon seul ami mon camarade, tous les deux nous avons fait les barricades, mon camarade''. On annonce enfin le gâteau de la fête, l'officielle raison de notre présence à tous, le parcours de ce centième tour. Il est beau, plein de promesses, plein d'espoirs, plein de souvenirs aussi comme Charles: ''un jour ou l'autre, on veut faire à l'envers ce qui fut notre course mais on perd à remonter aux sources, un jour ou l'autre''.

Triomphe pour cette belle réussite qui nous mènera de Porto Vecchio à Paris. On finit par des champions sur la scène, de simples acteurs posés là, car on sait, en dépit de leur palmarès, qu'aujourd'hui ce n'est pas eux les plus importants. Le plus important c'est le public de Juillet sur le bord des routes, Ils seront 12 Millions, le plus important c'est la beauté de la France en Juillet, elle déroulera 3360 kms carrés de magie géographique. Le Tour est plus fort que tout semble être la devise du jour. La preuve en est, il a 100 ans et il est toujours présent, tout comme Robert Marchand également présent ce jour-là, le centenaire le plus rapide à vélo qui au bas de la scène serre vigoureusement la main de Christian Prudhomme comme si le centenaire qu'il est représentait le Tour à lui tout seul, remerciant ceux qui le soutiennent en dépit de ses errements passés, s'excusant déjà des écarts futurs. Puis c'est la fin de la cérémonie que beaucoup ont trouvée belle, que d'autres ont trouvée rebelle, d'autres l'ont trouvée décevante, d'autres insignifiante. Elle ne pouvait pas plaire à tout le monde, ni faire plaisir à tout le monde car tout le monde cherche le responsable de la situation qui est toujours l'autre forcément et pourtant comme le chante Charles ''Dans dix ou vingt ans qui sait, si enfin libre désormais d'un passé de bosses et de plaies faites d'orgueil et de bêtises, malgré le mal que tu me fais, connaîtrons nous enfin la paix ?''. Tous les espoirs sont donc permis même si au sortir du Palais les langues se délient, les regards se fuient, on refuse certaines poignées de main, on esquive quelques approches, on évite certains sujets car tout est à fleur de peau. Personne n'a la solution mais tout le monde a des idées. Chacun trimballe nerveusement ses propres questionnements, ses propres doutes cherchant de nouvelles alliances, réfutant de vieilles amitiés ''Mon ami mon judas, dans l'ombre joue avec ta proie, tire adroitement les ficelles, tu n'es pas bouffon, tu es roi, je ne suis que polichinelle, moi, doux rêveur et tête de bois''. Faut-il construire encore sur cette vieille bâtisse à la si belle apparence mais presque en ruine à l'intérieur ? Certains le croient, pas d'autres et pourtant tous sont venus au pied du vénérable centenaire c'est bien la preuve que malgré tout ils continuent à le respecter, à l'aimer en secret, comme moi ''Et moi dans mon coin, si je ne dis rien, je remarque toutes choses, et moi dans mon coin, je ronge mon frein, en voyant venir la fin'' Pour une fois Charles je ne suis pas d'accord avec ta chanson car moi je ne vois pas venir la fin, je vois un début… Début de je ne sais pas de quoi mais il est notre seule issue. Je sais que vous pensez tous comme moi alors continuons à y croire car c'était quand même un joli tour de chant, pas un chant du Cygne mais un chant du Signe, celui du destin, peut-être le dernier signe qu'il faut vite interpréter, qu'il faut rapidement saisir car ce 24 Octobre 2012 il est notre dernière chance de chanter comme Charles ''Emmenez-moi au bout de la terre. Emmenez-moi au pays des merveilles, il me semble que la misère serait moins pénible au soleil''.

Marc Fayet 
26 octobre 2012